Le soleil que dessine sa bouche éclaire son visage. Subjugué, ce spectateur averti a cessé d’agiter frénétiquement son drapeau. Son voisin, le doigt tendu vers l’icône, rayonne autant que lui. Cela se passe à Fleury, au km 19 de la 3ème étape du Tour de France 2016, puis à Landéan, au km 82, mais aussi un peu plus loin et encore le lendemain. La scène se reproduit sans cesse et se reproduira encore jusqu’à la fin de la Grande boucle, au passage de la Ford Mustang aux couleurs du Team Sky.
Habituellement, pour les amoureux de la petite reine, les stars sont dans le peloton. Cette année, une brille plus que les autres. Elle se situe juste avant le peloton. Sur chacune des 21 étapes du Tour de France, 421 chevaux arpentent, en effet, le parcours avant les 198 coureurs. Ceux qui se cachent sous le capot de la Mustang fournie par Ford au Team Sky, dans le cadre de son partenariat avec l’équipe britannique.
En plus des Mondeo SW, S-Max, Edge, Tourneo et autres Transit, Ford a en effet ajouté une Mustang à la flotte de véhicules de l’équipe. Cette Mustang Fastback V8 boîte automatique dans sa livrée noire et bleue est un modèle unique, spécialement apprêté pour le Tour de France.
Une vigie aux avant-postes
Rod Ellingworth est responsable de la performance chez Team Sky. En temps normal, il veille à ce qu’aucune interférence extérieure ne vienne perturber les coureurs. Sur le Tour, sa mission est un peu différente. Au volant de la Mustang, il effectue les 3 519 km du parcours quelques minutes avant le peloton, avec un rôle tantôt de vigie, tantôt de relations publiques.
“Chaque matin, au briefing de l’équipe, on regarde les informations données par l’organisateur et on note les points à vérifier. Une fois en voiture, je regarde donc la direction et la force du vent, l’évolution de la météo, l’état de la route, la qualité du revêtement, la configuration des carrefours, l’étroitesse de la route, les virages dangereux, la présence du public… Tout ce qui peut permettre aux coureurs d’éviter les pièges”, explique Rod Ellingworth.
Pour remonter les informations en temps réels, Rod s’arrête ainsi sur le bas-côté jusqu’à 15 fois par course pour envoyer des textos aux directeur sportifs et aux mécaniciens. Charge à eux, ensuite, de relayer ces éléments aux coureurs de l’équipe.
Par endroit, le goudron peut parfois fondre sous l’effet de la chaleur. D’autres fois, des trous se forment dans la chaussée et peuvent devenir extrêmement dangereux. Signaler ce genre de problème est devenu essentiel dans le cyclisme professionnel. “La plupart des équipes ont désormais une personne qui se chargent de la reconnaissance”, confie Rod Ellingworth. En revanche, pour remplir cette mission, toutes ne disposent pas d’une Mustang.
Une côte de popularité au sommet
Sur le Tour comme ailleurs, la côte de popularité de la Mustang est énorme. Au village départ des étapes, le public tourne autour, se prend en photo devant elle, questionne les membres de l’équipe… Même les coureurs s’arrêtent.
“Il y a une vraie différence avec les autres voitures. Tout le monde l’aime. Je suis dans le cyclisme depuis toujours et je n’ai jamais vu ça”, commente Rod. “Dans les paddocks, on me fait signe, on vient me voir. Les staffs comme les coureurs veulent en savoir plus sur la voiture. Même pendant la course, les autres voitures s’arrêtent à hauteur et prennent des photos”, explique-t-il.
Dès le début de la Grande boucle, le public présent en masse au bord des routes n’a pas manqué de saluer la pony car. Avec sa côte de popularité constamment au sommet depuis sa commercialisation en 1964, la Mustang attire immanquablement la sympathie. Lors de la 1ère étape du Tour, le 2 juillet dernier, la belle américaine a été la première du Team Sky à rallier Utah Beach et les plages du débarquement, où était jugée l’arrivée. Son passage dans les rues de Sainte-Mère l’Eglise, à 12 km de la flamme rouge a été très remarqué.
“Tout le monde reconnait cette calandre avec ce cheval. C’est une icône, un état d’esprit que les gens saluent”, commente Rod Ellingworth.
Durant les trois premières étapes, plus d’un million de spectateurs se sont massés sur le bord des routes normandes, malgré une météo capricieuse. Pendant les trois semaines du Tour de France, ce sont entre 12 millions et 15 millions de spectateurs qui verront la Mustang Team Sky le long du tracé.
Sur les étapes, qui durent cette année entre 113 et 237 km, le public salue la voiture. Inlassablement, Rod Ellingworth répond. D’un coup de Klaxon, ou en saluant le public.
“Le Tour est une course à part. C’est une fête pour les gens, pour les villages, pour tout le monde. On essaye de répondre et de dire bonjour tout le temps, mais ce n’est pas facile. Je pourrais passer ma journée à ça. J’essaie donc de rester concentré en ayant une petite attention pour chacun”.
Quand Rod s’arrête pour écrire ses textos à l’équipe, entre les camping-cars et les innombrables repas de famille qui bordent les routes du Tour, les fans se ruent à sa fenêtre et réclament une casquette, un bidon ou un simple bonjour. En retour, on lui propose une tasse de thé ou un morceau de gâteau. Souvent on agite même quelques bouteilles de vin à son carreau. Toujours avec le sourire et dans une ambiance bon-enfant, celle du Tour.
Des gendarmes au garde-à-vous
“Parfois, les gens me demandent de faire chanter le moteur. Ça me fait sourire, mais il faut être sérieux. Il y a beaucoup de dangers lorsque l’on roule dans ce genre de convoi. Les enfants qui se précipitent sur la route parce qu’ils ont perdu un ballon offert par la caravane du Tour, un chien trop avancé, une personne qui traverse pour mieux voir… Ce n’est pas une simple promenade”, détaille Rod Ellingworth. Les règles de circulation sont donc très strictes.
Tous les jours, les forces de l’ordre procèdent à des contrôles de vitesse. Si le conducteur est pris en flagrant délit d’excès de vitesse, il hérite d’une amende et est exclu pour l’étape suivante. S’il récidive, il est purement et simplement exclu du Tour avec sa voiture. Les gendarmes sont intransigeants. Parfois, ils sont un peu plus taquins.
“Sur la première étape, je conduisais paisiblement”, raconte Rod. “Au bout d’une longue ligne droite, les gendarmes m’ont demandé de m’arrêter. Même si je roulais tranquillement, j’ai été surpris. En fait, je n’avais rien fait de mal. Ils trouvaient juste la Mustang superbe et voulaient la voir de plus près. Ils m’ont même demandé de l’essayer”, se souvient-il.
Une anecdote symptomatique de l’effet Mustang dans le peloton. “Ce que provoque cette voiture est unique”, martèle Rod. Le soir, lorsqu’il rejoint l’hôtel de l’équipe, les séances de selfies avec l’icône se poursuivent. Rod, lui, file au débriefing et commence à préparer l’étape du lendemain. Une autre journée de défis pour les coureurs. Une autre journée de folie pour Rod, au volant de sa Mustang.