Ford Europe développe actuellement une usine virtuelle complète destinée à simuler la production d’un bout à l’autre des chaînes de montage.
Concrètement, ce projet permet de simuler et d’analyser toutes les phases de construction d’un véhicule avec pour objectifs une réduction des coûts et une amélioration de la qualité.
« En travaillant sur notre projet d’usine virtuelle, nous limitons le recours aux essais grandeur nature sur les chaînes de montage », indique José Terrades, ingénieur simulations chez Ford Espagne.
« Ces usines virtuelles vont nous permettre de prévisualiser et d’optimiser l’assemblage de nos futurs modèles dans toutes nos usines, partout dans le monde. Compte tenu des simulations sophistiquées et des espaces virtuels dont nous disposons déjà, nous pensons y parvenir à très brève échéance. »
La fabrication complète d’un véhicule implique l’assemblage de milliers de pièces. La simulation du montage permet de tester la procédure avant d’investir dans les moyens de production concrets. En 1997, Ford a été le premier constructeur automobile à planifier l’assemblage de véhicules dans différentes usines du monde par simulation numérique. Cette simulation fait désormais partie intégrante des procédures appliquées par Ford.
« Grâce à la simulation d’assemblage final utilisée aujourd’hui, nous allons bien au-delà d’une simple planification des séquences de montage, explique Nick Newman, responsable de la production à Ford Allemagne. Nous pouvons assembler pièce par pièce des véhicules entiers dans un espace virtuel, comme un gigantesque puzzle, et ainsi analyser la fabrication dans ses moindres détails. Nous prévoyons même d’aller plus loin encore à l’avenir. »
L’usine de Valence, en Espagne, figure en pointe dans le développement de ces usines virtuelles, qui permettront bientôt de réaliser des évaluations à distance dans le monde entier.
Ford fait appel à des caméras sophistiquées pour filmer et numériser ses usines réelles, puis créer des ateliers de montage tridimensionnels ultra-réalistes. Les scénarios de fabrication interactifs sont générés en réalité virtuelle 3D à partir de projecteurs spéciaux et en utilisant des écrans polarisants sensibles au mouvement. Il s’agit de simuler chacun des gestes accomplis au quotidien par les opérateurs de chaîne afin d’aider les ergonomistes de Ford à éliminer les postures pénibles et à optimiser les différentes étapes de l’assemblage.
Basés à Cologne, en Allemagne, ces spécialistes s’appuient sur la simulation pour observer l’ajustage de chaque composant et évaluer l’opportunité de modifications qui simplifieraient au maximum la tâche de l’ouvrier.
L’employé virtuel « Jack » reproduit ainsi les gestes des hommes et des femmes qui travaillent sur les chaînes d’assemblage. Il teste et analyse en détail les procédures, y compris la liberté de mouvement des doigts des opérateurs dans un volume confiné. Le programme informatique sophistiqué de « Jack » évalue les contraintes subies concrètement par l’opérateur et identifie dès ce stade 80 % des problèmes ergonomiques de la chaîne.
Pour analyser efficacement l’intégration de composants, ces simulations en 3D combinent des données techniques et des images scannées de prototypes physiques. Ford envisage donc aussi de s’appuyer de plus en plus sur ces véhicules en « réalité augmentée » pour simuler des « séquences de montage virtuelles ». Dans le cadre des programmes de nouveaux modèles, cette méthode présente l’énorme avantage de réduire les besoins en vrais prototypes de véhicules ou d’outillages à des fins d’évaluation, puisque les données de chaque pièce numérisée, chargées dans un espace de montage virtuel, permettent de simuler de bout en bout l’assemblage du véhicule.
À Cologne par exemple, Ford étudie les habitacles de ses modèles en cours de développement sur un dispositif baptisé CAVE (Cave Automatic Virtual Environment). Il met en œuvre des images 3D interactives qui servent à étudier différents aspects – visibilité, accessibilité des instruments, ergonomie, habitabilité…– avant de passer à la fabrication d’un prototype.
« Le système CAVE apporte une dimension émotionnelle au processus de développement, dit Joerg Querengaesser, responsable réalité virtuelle et environnement de conduite chez Ford Allemagne. Nous ne nous limitons plus à visualiser un véhicule uniquement à travers ses paramètres techniques. Nous pouvons maintenant prendre place à l’intérieur et tester le modèle virtuel avec des sensations proches de la réalité. »